18h
« Intervention divine » (Yadon ilaheyya) d’Elia Suleiman (2002 - 92')
« Je suis fou parce que je t’aime »... dit le héros de ce film en guerre, qui pourrait aussi bien englober dans sa déclaration enflammée sa fiancée, son père, sa mère, sa patrie, la Palestine et pourquoi pas... Israël... Suleiman le pacifiste se bat avec une férocité terrible, mais ses armes sont celles de l’esprit, de l’humour, du burlesque, de l’intelligence, de la poésie. Suleiman déclare la guerre à tous les fascismes du monde, mais n’oublie pas une seconde qu’il est Palestinien jusqu’au trognon, et sous l’humour pointent les ravages d’un désespoir qui n’est pas près de s’apaiser ... Suleiman n’est pas un calme, même si son visage a la placidité de celui de Buster Keaton. Suleiman est un utopiste d’une lucidité fracassante. Suleiman est un fou d’une sagesse extraordinaire.
Deux amants s’aimaient d’amour tendre... Elle est Palestinienne et vit à Ramallah, il est Palestinien et vit à Jérusalem. La situation étant ce qu’elle est, aucun des deux ne peut franchir le poste de contrôle israélien, et leur seule possibilité de rencontre est le parking juste à côté du check point. L’homme (Elia Suleiman lui même) évolue entre son père malade dans un Nazareth en folie, et cet amour inconfortable. Vie impossible, frustrations permanentes... Le désir de plus en plus furieux et complice des amants va engendrer des événements d’une apocalyptique drôlerie, une revanche fantasmée à la virtuosité étourdissante... Il est impensable de raconter un film aussi furieusement original, tellement son comique, très visuel, réside dans l’articulation de chaque situation, dans leur décalage, leur rythme.
« J’espère qu’aimer un film comme celui-ci peut amener chacun à rechercher la petite part de fascisme qu’il porte en lui-même, et pas seulement à dénoncer le fascisme israélien, aujourd’hui si évident que c’en est obscène de le dire. ».
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